Les oubliés: Osias Ouimet

Osias Ouimet : l’homme aux mille chapeaux

J’ai vraiment connu une enfance privilégiée en grandissant aux pieds des pentes du mont Tremblant. Des gens de tous les milieux visitaient l’endroit et des personnages colorés et attachants y travaillaient.

Ce mois-ci, je vais vous présenter Osias Ouimet, qui était ni plus ni moins l’homme aux mille chapeaux de Station Mont Tremblant. Cet homme avait un problème de prononciation; il était bègue.

Il ne parlait pas anglais et pourtant, il devait souvent travailler avec le public qui était en grande partie constitué d’une clientèle anglophone.

Osias était enjoué, charmant et très fidèle envers ses employeurs. Il tenait un rôle un peu ingrat à la montagne; celui de remplaçant. Lorsqu’un préposé à l’arrivée des T-barsou au sommet des télésièges ne se présentait pas au travail, on faisait appel à Osias.

Il en allait de même pour un employé qui manquait aux stationnements du côté sud ou nord. Il était l’homme sur qui l’on pouvait compter et qui rapidement se mettait à la tâche.

Le « policier »

Pour affermir son autorité dans les aires de stationnement, il portait un uniforme de policier spécialement taillé pour lui. À l’époque, le contrôle des stationnements s’effectuait de la petite chapelle jusqu’au chalet des voyageurs, qui était situé à l’entrée actuelle de la place Saint-Bernard, tout près du Fat Mardis.

Il y avait toujours de la congestion, surtout les fins de semaine. Vers 11 h, l’affluence de véhicules prenait le dessus sur la bonne volonté d’Osias et la tension montait. Avec son anglais approximatif, sa personnalité joviale et un sens de l’humour bien à lui, Osias parvenait à retourner une situation délicate qui savait plaire les clients.

Lorsque M. le « policier » indiquait un espace de stationnement moins désirable, un petit pourboire amical faisait en sorte que soudainement se découvrait un espace plus intéressant.

Le client se sentait important puisqu’il avait influencé un « policier » et Osias se payait une bonne bière. Cette petite combine était un secret de polichinelle. Le patron était au courant du petit tour de passe-passe puisque Osias s’en vantait après avoir bu sa bière.

Lorsque le « party pognait »

Osias était également derrière la personnalité de la mascotte de l’époque, Onesime; un orignal pourvu d’un immense panache. Onesime apparaissait aux évènements importants de la station, qu’il s’agisse des compétitions de ski, du défilé du père Noël, des partys privés ou; des courses de tape-cul.

En fin de journée, les employés organisaient une compétition de tape-cul pour terminer la journée. Les employés du versant sud s’opposaient à ceux du versant nord et Onesime (Osias) campait le rôle d’arbitre officiel de la compétition.

La clientèle de l’hôtel, intriguée, se joignait à l’évènement. Certains audacieux participaient même à la course et, comme on dit, le « party pognait ».

Et toutes tâches connexes…

Étant donné que la station a ouvert ses portes en 1939, les équipements de cuisine et de bar n’étaient pas très sophistiqués. Alors, pour garder la nourriture fraîche, un immense hangar servait de glacière.

La glace provenait du lac Tremblant et le responsable de l’approvisionnement était M. Paul Émile Léonard. S’il manquait un homme, on avait recours à Osias qui, armé d’une « box saw », coupait des blocs de glace.

Un vrai de vrai

Osias était également responsable de l’écurie. Le Tremblant Lodge mettait à la disposition des clients une quinzaine de chevaux pour des randonnées équestres en montagne et autour des lacs, sans oublier les chevaux de travail qui se trouvaient sur les lieux.

Pendant les congés scolaires, je passais beaucoup de temps avec Osias à l’écurie. J’avais pour responsabilités de nettoyer les box, de cirer les selles et de brosser les chevaux. Ma récompense, puisque j’étais bilingue, était d’accompagner les clients lors des randonnées.

Je montais le cheval de Mme Ryan; Blondie. Il portait le même nom que mon cocker qui m’accompagnait également. J’étais comme un vrai de vrai; un cowboy avec mon cheval et mon chien.

De mémoire, Osias n’a jamais manqué une journée de travail. Sa personnalité et sa persévérance m’ont profondément marqué. Il m’a montré comment chacun peut faire son chemin en misant sur ses forces, et ce, malgré un handicap.

 

Du même auteur : Jean Fleurent, l’homme des gros travaux (Cliquez sur l’image)

 

Peter Duncan121 Posts

Membre de l’équipe canadienne de ski alpin de 1960 à 1971, skieur professionnel de 1971 à 1979 et champion américain en 1965, Peter Duncan a participé aux Jeux olympiques de 1964 à Innsbruck ainsi qu’à ceux de 1968 à Grenoble. Intronisé au Temple de la renommée du ski au Canada, au Panthéon des sports du Québec et récipiendaire de la médaille du gouverneur général, Peter a longtemps été commentateur de ski à la télévision./ Peter Duncan is a Canadian former alpine skier who competed in the 1964 and the 1968 Winter Olympics. He was named to the Canadian National Alpine Team in 1960 at the age of 16 and competed at the national level for the next 10-years until 1970 before retiring.

Michel Normandeau

Connor O’Brien

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