La Lac-Poisson, 40 ans plus tard

Aveu : j’habite Mont-Tremblant à temps plein depuis près de trois ans, mon engouement pour le ski de fond a déjà frôlé la compulsion, je passe mes journées d’hiver avec des skis aux pieds, mais je n’avais pas fait glisser mes planches dans le parc du Mont-Tremblant depuis presque 40 ans !

Le mois dernier, pour me dédouaner en compétente compagnie et aussi dévier l’opprobre, j’ai invité le camarade Jean-Guy à m’accompagner. Il a passé les deux dernières décennies sur les coteaux du lac Mercier, skie comme un lièvre en style classique, pas de patin ou alpin – choisissez votre arme – et n’avait jamais skié sur les pistes du parc. C’est encore pire que moi, non ?

Pour ces retrouvailles, j’ai choisi de renouer avec la piste Lac-Poisson, que les habitués considèrent comme le joyau du parc pour le ski de fond de style classique. Par un rigoureux week-end de l’hiver 1981, j’y avais fait glisser mes Trysil Knut norvégiens en bois de noyer, sans cambrure et goudronnés avec application, jusqu’au refuge La Perdrière où mes compagnons et moi avions passé la nuit.

Fait un p’tit moins 17 Celsius de janvier quand le lièvre Jean-Guy et moi mettons le cap vers la Lac-Poisson, version 2020. Le froid a rendu la neige un peu rugueuse – l’élégant pas alternatif tout en glisse sera pour une autre fois – mais le soleil brille, le vent a fort heureusement pris congé et nous sommes seuls au monde, ou à peu près.

Ça grimpe !

Du Centre de découverte, une piste verte de réchauffement mène rapidement vers la Poète bleue qui file sur quelques kilomètres jusqu’au refuge Le Campe. Oui, avec un e !

À partir de là, la noire Lac-Poisson grimpe les courbes de niveau de la colline avec une obstination rectiligne, puis se love au creux d’un vallon ascendant en direction du petit lac Poisson, où le refuge de La Perdrière a pignon sur rive.

Fait pas chaud. Nous faisons un feu pourtant vif dans le poêle à combustion lente mais la température du refuge ne bouge pas d’un degré.

Lorsque nous partons 15-20 minutes plus tard, les vêtements mis à sécher sont gelés, le mercure semble bloqué à moins 17 C à l’extérieur et les courbatures naissantes générées par tous ces mètres gravis en pas de canard me rappellent mon âge et ma temporalité…

Et la montée continue. Pas grave, ça réchauffe et le lac Poisson nous attend dans le tournant. L’hiver y a figé le temps, la lumière filtre à travers un filet de nuages annonciateurs de neige, le silence enveloppe.

Après quelques instants, de retour de son congé, le vent nous rappelle à l’ordre et force la reprise du pas de canard jusqu’au faîte de la piste. La récompense est là : 2-3 kilomètres de descente sur une neige qui pardonne les petites erreurs de pilotage et nous dépose à quelques poussées du Centre de découverte. Bonheur et reconnaissance.

Me vient alors une pensée, la même qu’après chaque sortie sur des planches dans la forêt hivernale. Pourquoi diable est-ce que je n’arrive pas à trouver le temps de pratiquer le ski de fond plus souvent ?

 

Alain Bisson47 Posts

Journaliste depuis plus de 30 ans, Alain Bisson a débuté sa carrière au Journal de Montréal à titre de journaliste à l'économie. Au cours des dernières années, Alain fut également directeur du pupitre et directeur des contenus week-end à La Presse. / A journalist for more than 30 years, Alain Bisson began his career at the Journal de Montreal as a journalist covering economics. In recent years, Alain was also weekend content director and bureau chief for La Presse.

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