Jackrabbit, l’éternel

Herman Smith-Johannsen, alias Jackrabbit, est né le 15 juin 1875 à Horten, en Norvège. Il est décédé le 5 janvier 1987 à Tønsberg, dans son pays natal, à l’âge canonique de 111 ans.

Herman fait ses études supérieures en Allemagne à l’université Humboldt de Berlin. Il obtient son diplôme en génie mécanique en 1899. Peu de temps après sa graduation, il immigre à Cleveland aux États-Unis où il commence une carrière de vendeur de machines industrielles.

Alors qu’il voyageait en Ontario pour vendre de la machinerie destinée à la construction du chemin de fer du Grand Tronc, il rencontre des Cris près de North Bay qui lui attribuent – en raison de sa manière de flotter sur la neige en ski – le surnom de Chief Jackrabbit (Okamacum Wapoos).

En 1907, Herman Smith-Johannsen épouse Alice Robinson et le couple s’installe à La Havane, à Cuba. Loin des pistes enneigées, Johannsen vend de l’équipement pour la transformation de la canne à sucre dans les Antilles.

En 1915, l’appel de la neige devient trop fort et la famille se dirige vers le nord pour s’établir à Lake Placid. Herman Smith-Johannsen y poursuit sa carrière de vendeur de machines industrielles et voyage sur une base régulière entre Lake Placid et Montréal.

La famille Johannsen déménage à Montréal en 1929 et, durant la grande dépression, s’installe à Piedmont. Durant les années 20, 30, 40 et 50, Herman fait la promotion du ski dans la région de Lake Placid ainsi qu’au Québec et en Ontario. De 1932 à 1935, il défricha la piste Maple Leaf, reliant Saint-Sauveur, Prévost, Sainte-Adèle, Val-Morin, Sainte-Agathe-des-Monts, Mont-Tremblant et Labelle.

En 1939, il publia le Skiers’ Book.  Bilingue et gratuit, ce guide de poche contenait des cartes topographiques des Laurentides où étaient exposés les sentiers de randonnée, les pistes de descente et les remontées mécaniques.

Des petits déjeuners qui resteront gravés dans ma mémoire

Mes premières rencontres avec Monsieur Johannsen remontent à la fin des années 40 et le début des années 50. Nous habitions alors sur le versant nord du mont Tremblant où mes parents étaient responsables d’un charmant petit Hôtel, le Devil’s river Lodge, situé à quelques mètres du bas de la piste Sissy Schuss.

Régulièrement, M. Johannsen se pointait vers 6 h du matin accompagné de son gendre, Peter Austin, le mari de sa fille Peggy, pour prendre le petit déjeuner avec mon père et moi-même.

Je partais pour l’école vers 7 h du matin, au moment même où Herman Johannsen et Peter Austin partaient skier. À mon retour, ils sortaient tout juste du bois et, malgré mon jeune âge, je réalisais que ces deux hommes venaient de passer la journée aux quatre vents à ski de fond à s’occuper des sentiers.

J’osais imaginer qu’ils avaient tout de même mangé un petit quelque chose et qui sait, s’étaient peut-être même allumé un feu pour se faire chauffer une tasse de thé. À cette époque, Jackrabbit avait dans les 75 ans. C’était un être singulier, tenace, vigoureux, curieux et intense.

Lors de ma période de Sainte-Agathe High School, il y avait une compétition entre les écoles anglaises de la région. C’était la « Four Way Compétition » ski de fond, saut, slalom et slalom géant.

Hiver 1980. Jack Rabbit à l’âge de  105 ans.

Sachant que je passais tout l’hiver en Europe avec l’Équipe canadienne de ski, mon père avait négocié que l’école m’accepte à deux conditions. La première impliquait que je devais passer l’été à l’école et la deuxième était de participer à cette fameuse compétition.

Johannsen organisait cet événement. Il avait dans les 90 ans et j’étais très conscient de son grand âge, car il ne se gênait pas pour me passer des commentaires sur ma piteuse technique de fondeur et sur mes prouesses aux sauts qui, bien que longs, étaient loin d’être gracieux.

Il traçait lui-même la piste de ski de fond de 20 km. De plus, il était juge des sauts et chef de course des slaloms.

Sa fille Peggy m’expliqua alors que depuis quelque temps, son père passait ses étés en Norvège. Pour assumer les frais du voyage, il se trouvait un petit job sur un cargo norvégien et offrait ses services comme spécialiste de nœuds marins. À cette époque, il avait 100 ans.

Nous aimerions tous détenir le secret de l’élixir de la vie éternelle et sans aucun doute, Herman Johannsen l’avait découvert ! Tout compte fait, son nom de Cri le décrivait très bien.

 

Du même auteur : Ernie McCulloch, le « King de la montagne » (Cliquez sur l’image)

 

Peter Duncan121 Posts

Membre de l’équipe canadienne de ski alpin de 1960 à 1971, skieur professionnel de 1971 à 1979 et champion américain en 1965, Peter Duncan a participé aux Jeux olympiques de 1964 à Innsbruck ainsi qu’à ceux de 1968 à Grenoble. Intronisé au Temple de la renommée du ski au Canada, au Panthéon des sports du Québec et récipiendaire de la médaille du gouverneur général, Peter a longtemps été commentateur de ski à la télévision./ Peter Duncan is a Canadian former alpine skier who competed in the 1964 and the 1968 Winter Olympics. He was named to the Canadian National Alpine Team in 1960 at the age of 16 and competed at the national level for the next 10-years until 1970 before retiring.

Michel Normandeau

Connor O’Brien

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